Comment anticiper les défaillances d’entreprises ? On sait que plus de 75% des procédures collectives sont des liquidations judiciaires, ou bien des redressements convertis en liquidation. Dans 99% des cas de liquidation, les créanciers ne récupèrent rien. Il est donc essentiel d’anticiper les défaillances. Pour cela, les outils d’analyse financière et de scoring sont importants. Mais ils sont fondés sur des données comptables, qui ne sont pas toujours publiées ou connues.
Quels sont les signaux faibles, à repérer pour anticiper les défaillances de ses clients ?
Quelle est la fiabilité des comptes et du scoring ?
Bien sûr, la comptabilité suit un référentiel très précis, et les experts comptables forment une profession réglementée et très surveillée.
La comptabilité reflète la situation passée, et l’information n’est pas disponible en temps réel : une société a un délai de 6 mois pour faire approuver ses comptes par son assemblée générale, et la publication par le greffe du Tribunal de Commerce prend encore quelques mois supplémentaires. Si les comptes d’une année ne sont pas disponibles au public avant l’automne de l’année suivante, on comprend bien que la situation financière d’une entreprise a pu évoluer défavorablement pendant l’intervalle, et se dégrader très fortement en un an !
Le scoring est une méthodologie que attribue une note aux entreprises, ainsi qu’une probabilité de défaut, en fonction de leurs états financiers. Le scoring a donc également le défaut du retard par rapport au temps réel, même s’il peut être ajusté de façon plus réactive.
De plus, le scoring n’est pas exempt de faux positifs : on voit régulièrement des sociétés notées autour de 30/100 qui se retrouvent en liquidation judiciaire simplifiée, alors que cette note, certes plutôt basse, ne devrait normalement pas annoncer une défaillance totale rapide.
Le scoring tient compte des éventuels privilèges de l’URSSAF, qui sont inscrits lorsqu’il y a du retard dans le paiement des charges sociales. Et on sait que l’URSSAF n’hésite pas à faire assigner des débiteurs en retard, comme on l’a expliqué récemment dans cet article.
Comment faire si les comptes ne sont pas publiés ?
Une entreprise peut décider de ne pas publier ses comptes au greffe du Tribunal de Commerce. Cette pratique est légalement interdite, mais les sanctions ne sont pas dissuasives et en réalité jamais appliquées. L’absence de publication des comptes est un premier signal : on sait que, parmi toutes les entreprises en procédure collective, une sur deux n’a pas publié ses comptes des exercices précédents. L’absence de publication des comptes n’est donc pas qu’un signe de négligence ou une volonté de discrétion, c’est aussi un signal de fragilité.
Précisons qu’il est possible de publier ses comptes de façon confidentielle : dans ce cas, les comptes ne sont pas publics , mais accessibles uniquement par les sociétés d’évaluation et de scoring, ainsi que par le système bancaire.
Quels signaux doivent alerter ?
Il existe plusieurs signaux faibles qui doivent alerter sur la fragilité d’une entreprise, et le risque de défaut.
- Un faible capital social indique que les actionnaires n’ont pas voulu investir beaucoup de leur propre argent dans l’affaire, et n’ont donc pas grand chose à perdre.
- Le siège social chez le dirigeant ou dans une société de domiciliation est une information plutôt négative.
- Une visite sur le site internet de l’entreprise est instructive : un vieux site, non mis à jour récemment, n’est pas positif. De même si l’adresse e.mail est sur gmail ou outlook, et non pas sur le nom de l’entreprise. La revue des réseaux sociaux : LinkedIn, Facebook, Instagram, X, donne aussi des informations sur l’activité on-line régulière ou épisodique de l’entreprise ou de son dirigeant.
- L’antériorité entrepreneuriale d’un dirigeant mérite d’être regardée : si un dirigeant a déjà eu plusieurs entreprises en redressement ou liquidation judiciaire, c’est mauvais signe.
- Au niveau du business, la concentration de l’activité sur un ou quelques clients importants augmente le risque de défaillance si le client est perdu.
- La concurrence peut aussi fournir des informations, ainsi que les organisations professionnelles, notamment en terme de réputation.
En conclusion
Au-delà des informations financières et chiffrées sur une entreprise, il existe donc différents outils pour évaluer le risque de son client. Avec du bon sens et un peu d’astuce, on peut obtenir facilement les obtenir pour prendre ses décisions de façon éclairée.