Vente marchandise

Peut-on vendre à un client en redressement judiciaire ?

  • Juridique
  • Pierre Gonzva

Quels sont les points de vigilance et les précautions à prendre pour vendre à une société en redressement judiciaire ?

1° Les créances nées après le jugement de sauvegarde ou de redressement judiciaire

Un article récent de notre blog a expliqué les effets d’une procédure collective sur les créances antérieures au jugement, lequel interrompt toutes les poursuites individuelles.
Les créances nées postérieurement au jugement de sauvegarde ou de redressement judiciaire sont dites « de l’article L622-17 » par référence à l’article du code de commerce qui précise leurs modalités de paiement
Selon la loi, ces créances doivent être payées normalement à leur échéance. Si elles ne sont pas payées à l’échéance, elles deviennent privilégiées, et sont payées avant les autres créances, sauf les salaires notamment. La loi protège donc les créanciers qui acceptent de continuer à fournir des prestations à une entreprise en procédure collective.

2° Les créances nées après le jugement validant le plan de continuation

L’objectif de la sauvegarde ou du redressement judiciaire est de permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, son rétablissement, et le paiement des créances antérieures selon un plan de paiement, sur 7 à 10 ans en général.
Il y a donc 2 étapes dans la procédure collective : la 1ère entre la date du jugement de procédure collective et celle du jugement approuvant le plan de continuation ; la 2ème étape commence lorsque le plan de continuation est en place.
Les créances nées pendant la 1ère période sont donc protégées par les dispositions de l’article L662-17 du code de commerce.
Pour les créances nées après l’adoption du plan de continuation, ce sont les dispositions de droit commun qui s’appliquent.

3° Quelles sont les précautions à prendre ?

En premier lieu, il est recommandé d’avoir un dialogue avec son client ainsi qu’avec l’administrateur judiciaire, pour identifier les actes de gestion qui peuvent être effectués par le dirigeant seul, et ceux qui nécessitent l’accord de l’administrateur judiciaire. Cela varie selon chaque jugement de redressement judiciaire.

Il convient ensuite de prendre des précautions. Il n’est pas toujours possible de se faire payer d’avance, ou bien « au cul du camion », selon l’expression consacrée, c’est-à-dire à la livraison des marchandises, en particulier s’il s’agit de prestations de service. L’essentiel est de bien définir les modalités de paiement, et d’exiger un respect scrupuleux de ces modalités.

En cas de retard, il est préférable, si possible, de suspendre immédiatement les prestations ou les livraisons, et de vérifier la situation avec le client et l’administrateur judiciaire. L’idée est d’éviter d’avoir un compte client qui augmente trop.

Si la situation de sauvegarde se termine assez fréquemment par un plan de continuation, et donc la poursuite d’activité de l’entreprise, il n’en n’est pas de même pour le redressement judiciaire. Le plus souvent, le redressement est converti en liquidation judiciaire, soit parce qu’aucun plan de redressement n’a pu être mis en place de façon viable, soit parce que les actifs et le fonds de commerce ont été vendus, et que le produit de cette vente a payé les créanciers privilégiés, laissant les chirographaires sans possibilité de récupérer. Dans cette situation également, la société, devenue une coquille vide, est mise en liquidation.

En résumé,

il est possible de facturer à une société cliente après un jugement de sauvegarde ou de redressement judiciaire, à condition d’être très prudent. Cela nécessite une bonne connaissance de son client et de sa situation, ainsi qu’un suivi très pointilleux du compte.