Comment activer la clause de réserve de propriété, lorsque la vente d’un bien n’est pas payée ? Cette clause peut être mise en oeuvre lorsque le débiteur est en procédure collective : sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire. On peut ainsi récupérer le bien vendu non payé, ou bien s’en faire payer le prix, dans certaines conditions.
1. Conditions d’activation de la clause de réserve de propriété
Mettons d’emblée les choses au clair : ce qu’il est interdit de faire, c’est d’aller chez son client pour récupérer sans son accord la marchandise ! C’est assimilé à du vol, et le débiteur est en droit de porter plainte.
La clause de réserve de propriété doit avoir été acceptée par le débiteur, au plus tard lors de la livraison; en général, il est préférable de la faire figurer sur le devis, bon de commande, conditions générales.
Pour activer la clause de réserve de propriété, le débiteur doit être en procédure collective : sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire. On peut revendiquer un matériel se trouvant en l’état chez le débiteur, un bien incorporé dans un autre si la séparation n’entraine pas de dommage, ou encore un bien fongible de même quantité et même qualité, du carburant par exemple, des pièces de bois équivalentes, etc …
Le Code de Commerce précise les modalités en son article L624-16.
2. Modalités d’activation de la clause de réserve de propriété
En pratique, comment faire ? Selon l’article R624-13 du Code de Commerce, il convient de faire un courrier RAR au mandataire judiciaire et au débiteur, pour revendiquer le matériel, dans un délai de 3 mois à compter de la publication du jugement de procédure collective. A défaut d’accord dans un délai d’un mois, le créancier doit saisir le juge-commissaire au Tribunal de Commerce, dans le mois du délai de réponse. Le formulaire de revendication est accessible sur le site infogreffe. Le juge-commissaire fixe une date d’audience; le débiteur s’y rend lui-même, ou se fait représenter par son avocat.
L’intérêt principal de cette revendication est que le juge-commissaire peut décider que, s’il n’y a pas restitution du matériel, le prix en est payé immédiatement au créancier. Il peut également accorder des délais de paiement, avec l’accord du créancier; la créance prend alors le même statut qu’une créance née après la date du jugement de procédure collective, selon l’article L622-17 du Code de Commerce. Et voici comment une créance sort de la procédure collective pour redevenir une créance normale, payable à son échéance !
3. Un cas récent : des machines d’une salle de sport
Dans un cas récent d’un dossier du Cabinet d’Ormane, le créancier est un fabricant de machines de musculation, vendues à une salle de sport; la créance se monte à près de 20.000 €.
Suite au redressement judiciaire du débiteur, une action en revendication est introduite. L’intérêt du créancier est que le débiteur continue son activité : le paiement des machines est bien entendu préférable à leur restitution, qui aurait entrainé la liquidation judiciaire de la salle de sport. C’est ce qui est plaidé par l’avocat, sachant que créancier et débiteur se sont accordés au préalable sur un paiement en 8 mensualités de 2500 €. Le juge-commissaire rend une décision qui entérine l’accord de règlement pris par le débiteur. La créance sort de la masse, et le créancier pourra plus facilement défendre ses droits si le plan de règlement n’est pas respecté.
Si l’action en revendication n’avait pas été faite, la créance serait restée dans la masse, et aurait été payée en 5 ou 7 ans, selon un éventuel plan de continuation. Le premier paiement serait intervenu un an après la décision avalisant ce plan, et il faut en général plus d’un an après la date du redressement judiciaire avant qu’un jugement de plan de continuation soit décidé par le Tribunal de Commerce. Grâce à la clause de réserve de propriété, la créance devrait donc être payée intégralement, bien avant la première annuité du plan de continuation.